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Rénovation d’une maison en pisé : erreurs et bonnes pratiques

Temps de lecture : 6 min

Rénover une maison en pisé : ce qu’il faut savoir

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Sommaire

Vous projetez de rénover une maison ancienne dans la région Auvergne-Rhône-Alpes ? Vous avez de fortes chances qu’elle soit en pisé. Pisé, bauge, torchis : on trouve également des maisons en terre banchée dans d’autres régions de France, notamment vers Toulouse, ou en Picardie, ce mode de construction ayant été pratiqué depuis l’antiquité dans toutes les régions aux sols argileux, limoneux ou encore sableux. Si la construction à base de terre a fait l’objet de nombreux écrits au 18e siècle, la rénovation d’un bâtiment en pisé reste un sujet délicat. On fait le point sur les bases de ce mode constructif et les bonnes pratiques et précautions à prendre lorsque l’on se lance dans la rénovation d’une maison en pisé.

La construction traditionnelle en pisé

Contrairement aux idées reçues, les maisons en pisé, c’est-à-dire construites à base de terre crue banchée parfois mélangée à du foin ou de la paille (on parle alors de bauge ou de torchis) et soutenue par une charpente en bois, sont solides et résistantes, comme en témoignent de nombreuses constructions de ce type pluri centenaires.

Durabilité des constructions en piséLa maison en pisé, une construction durable.

En effet, la terre est un matériau très stable, à condition de la protéger de l’eau et de réguler son taux d’humidité : trop humide, le mur en pisé se décompose, et à l’inverse, s’il est trop sec, il s’effrite. 

Les stratégies de protection contre l’humidité

Les murs en pisé étaient protégés de l’eau liquide selon une stratégie analogue à celle que nous mettons en place pour nous protéger de la pluie : avec des bottes, une cape de pluie et un parapluie.

  • Côté murs, les soubassements remplissent la fonction de bottes de pluie. Construits en pierre ou en galets, ils permettent de garder les pieds de mur au sec grâce à une bonne gestion des remontées capillaires.
  • La cape de pluie, c’est l’enduit qui recouvre les murs. Traditionnellement, il était constitué de chaux ou d’un mélange entre chaux aérienne et ciment.
  • Quant au parapluie, c’est évidemment la toiture et ses débords, qui abritent les murs de la pluie et des ruissellements.

 

Le pisé, un matériau vivant 

Dans une construction en pisé, l’ensemble du bâti est construit comme un tout indissociable. Les murs en terre banchée sont liés les uns aux autres par une charpente en bois. Bois et terre ayant la même propriété de se dilater et se rétracter selon les conditions climatiques, ils accompagnent le bâtiment dans ses mouvements. 

Ainsi, les matériaux constituant le bâtiment « vivent » sur le même rythme, ils réagissent de la même façon aux aléas météorologiques et restent soudés.

Rénovation d’une maison en pisé : les erreurs à éviter

Dans les années 50, l’apparition de nouveaux matériaux et l’avènement du béton a révolutionné les techniques constructives. Si ces innovations ont permis de se dégager de nombreuses contraintes – et notamment de répondre rapidement à un besoin de logements important, elles ont également contribué à la perte de certains savoir-faire traditionnels et aussi d’une certaine conception du bâtiment.

Aujourd’hui, on a tendance à considérer un bâtiment, une fois sorti de terre, comme un objet terminé voire hors sol, au sens où il n’est plus soumis à son environnement. Une logique à ne surtout pas appliquer aux bâtiments en pisé - qui comme on l’a vu, sont « vivants » - sous peine de créer des désordres importants !

Pour garantir la pérennité d’une maison en pisé, il est essentiel de ne pas perturber les transferts d’humidité et d’éviter les contacts directs avec l’eau humide. 

Or, les matériaux actuellement utilisés dans les travaux de rénovation ou d’embellissement - qu’il s’agisse de peinture intérieure, de ravalement de façade ou d’aménagement extérieur - sont pour beaucoup étanches à la vapeur d’eau et vont donc empêcher ces transferts indispensables d’humidité dans les parois. Voici un petit schéma explicatif des erreurs les plus communément rencontrées dans le cadre d’une rénovation de maison en pisé et de leurs conséquences sur le bâti.

Les mauvaises pratiques en rénovation de maison en piséLes pièges à éviter en rénovation de maison en pisé.

Au sol, la construction d’une dalle ou d’une terrasse en béton va imperméabiliser le sol et aboutir à une concentration de l’humidité qui, ne pouvant plus s’évaporer par le sol, risque de se déporter vers les murs sous forme de remontées capillaires, surtout si les soubassements ont été partiellement ou totalement enterrés.

Autre exemple : l’application d’un enduit extérieur inadapté ou d’une peinture étanche sur les murs empêchera l’eau présente sous forme gazeuse dans les murs de s’évacuer librement. 

En trop grande concentration et sous l’effet des températures, elle risque de se transformer en eau liquide et de créer des dégâts importants sur la structure des murs mais aussi de la charpente et des planchers bois. Sur un mur gorgé d’eau, les têtes de solives imbriquées dans le mur seront amenées à pourrir.

Ce tableau dépeint des cas de figure extrêmes et ne signifie aucunement que rénover une maison en pisé est impossible ! Par contre, il est nécessaire de prendre des précautions avant de se lancer.

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Comment rénover une maison en pisé ?

Il n’existe pas de solution clé en main pour rénover une maison en pisé. Comme pour tout projet de rénovation d’un bâti ancien, chaque cas est à examiner en fonction de l’environnement et de l’état du bâti. 

Avant de se lancer dans les travaux, il convient donc de faire réaliser des diagnostics. La charpente mérite une attention particulière, puisqu’en plus de supporter la toiture, elle lie les murs entre eux : en amont de toute rénovation, on s’assurera qu’elle est saine. De même, toute modification de la couverture, de la charpente ou même des cloisons ou sols intérieurs a potentiellement un impact sur l’ensemble de la structure du bâtiment et doit être réalisée en suivant les préconisations d’un bureau d’étude et être mise en œuvre par un professionnel qualifié et assuré.

Enfin, et comme évoqué plus haut, le principal point de vigilance lorsque l’on rénove une maison en pisé est la question de la gestion de l’humidité. Revue en image des bonnes pratiques.

Les bonnes pratiques pour rénover une maison en piséLes bonnes pratiques pour rénover une maison en pisé.

A noter : comme toute rénovation de maison, n’oubliez pas que si vous souhaitez modifier l’aspect extérieur de votre maison, vous devrez demander les autorisations de travaux auprès des services de l’urbanisme de votre localité.

L’épineuse question de l’isolation des murs en pisé…

Côté efficacité énergétique, la question de l’isolation des murs lors de la rénovation d’une maison en terre crue est un sujet épineux. D’ailleurs, les murs en pisé dérogent à l’obligation d’isolation lors d’un ravalement de façade. 

Isoler un mur en pisé avec une solution inadaptée peut avoir des conséquences sur la structure du bâtiment, mais également sur le confort intérieur. 

  • En effet, le pisé, par sa capacité à absorber et relâcher la vapeur d’eau, régule le taux d’humidité et participe ainsi au confort hygrothermique (c’est-à-dire à la sensation de confort lié à l’humidité de l’air ambiant). L’humidité, stockée en hiver, pourra s’évaporer au contraire en été, ce qui adoucira les températures. Ce phénomène fonctionne comme une climatisation naturelle.

  • Le pisé apporte également de l’inertie, ce qui contribue à lisser les températures par un phénomène de stockage de la chaleur dans le matériau et de restitution.

Le choix d’isoler les murs devra être réfléchi afin de ne pas diminuer la sensation de confort. Parfois un enduit de correction thermique sera plus indiqué….   

Améliorer l’isolation via un enduit de correction thermiqueAméliorer l’isolation via un enduit de correction thermique.

Seul un diagnostic de l’état des murs par un spécialiste permettra de définir des solutions adaptées, solutions qui peuvent varier sur les différents murs d’un même bâtiment en fonction de leur exposition au vent et à la pluie…

Plus globalement, toute opération d’isolation – changement des fenêtres inclus – va avoir un impact sur le renouvellement de l’air intérieur et doit donc s’accompagner de la mise en place d’une ventilation adaptée.

En cas d’isolation des murs, on veillera à mettre en œuvre un isolant et un parement ouverts à la vapeur d’eau, qui ne couperont pas les transferts d’humidité.

Zoom sur l’aménagement intérieur d’une maison en pisé

Généralement, les maisons en pisé sont d’anciens corps de ferme constitués de deux niveaux. Au rez-de-chaussée, de multiples petites pièces sont séparées par des murs autoportants, tandis que l’étage accueille un grenier. De nombreux mètres carrés à disposition, mais dont l’aménagement ne correspond pas nécessairement à notre mode de vie…  Sans prétendre à l’exhaustivité, voici quelques conseils et bonne pratiques à garder à l’esprit coté aménagement intérieur.

 

Moderniser en conservant l’esprit du lieu

Une maison en pisé, c’est une émanation du lieu sur lequel elle est construite : le bâtiment est à proprement parler sorti de terre. Néanmoins, on peut avoir envie d’un peu de modernité sans rien enlever à l’authenticité des matériaux. Qu’il s’agisse des murs, des sols ou des plafonds, tout est personnalisable, à condition de respecter l’équilibre du bâtiment. 

Prenons l’exemple de la salle de bains : la pièce, avec la cuisine, où le confort moderne s’impose plus qu’ailleurs et qui, dans une maison en pisé, demande une attention particulière au risque de transformer les murs en bain de boue. 

Pour rénover la salle de bain d’une maison en pisé, la solution la plus commune est de prévoir un doublage intérieur des murs en plaques de plâtres hydrofugés sur lame d’air ventilé. Pour garantir un bon confort thermique dans cette pièce (où la température de confort tourne autour des 22°C), il est souvent conseillé d’isoler les murs en contact avec l’extérieur avec un isolant (toujours ouvert à la vapeur d’eau et protégé par un pare-vapeur). Installer un système de ventilation complémentaire peut être nécessaire surtout si la pièce ne dispose pas de fenêtre. 

Côté sol, si la pièce est au rez-de-chaussée, le carrelage est à éviter car il ferait barrière aux transferts d’humidité provenant du sol, sauf s’il est circonscrit à une petite proportion de l’espace. Pour un revêtement facile d’entretien, vous pouvez par exemple opter pour de la tomette ou de la pierre naturelle jointée à la chaux. 

Dans les autres pièces, vous pourrez si vous le souhaitez conserver l’authenticité du matériau de vos murs tout en personnalisant votre intérieur. Des enduits à la chaux aérienne ou en terre crue protègeront élégamment vos murs. Les enduits en terre crue offrent un panel de couleur allant de l’ocre au gris, en passant par le rouge. Pour plus de choix dans la couleur des murs intérieurs, optez pour un enduit à la chaux aérienne recouvert d’une peinture au lait de chaux. Par contre, oubliez papier-peint, peinture étanche et faïence : comme pour le sol, les revêtements de murs étanches à la vapeur d’eau sont tout à fait contre-indiqués. 

Il en va de même pour les revêtements extérieurs. Qu’on soit dans le cas d’un ravalement de façade ou d’une rénovation avec une isolation par l’extérieur, l’ensemble des matériaux devra respecter les transferts d’humidité au sein des parois. Ainsi, seuls les matériaux laissant passer la vapeur d’eau pourront être employés :

  • Pour les ravalements : des enduits à la chaux ou composés de ciment mais ouverts à la vapeur d’eau ; 
  • Pour l’ITE sous enduit : les mêmes, associés à un matériau isolant devant lui-même être ouvert à la vapeur d’eau ; 
  • Et pour l’ITE sous bardage : tout type de parement extérieur autorisé par le PLU de votre localité, puisqu’une lame d’air entre l’isolant et le parement permet à la vapeur d’eau de circuler.

 

(Ré) aménager les volumes en toute sécurité

Ouvrir les murs

Il est tentant de réorganiser l’intérieur d’une maison en pisé et d’ouvrir certaines pièces afin de gagner en volume et en sensation d’espace. Dans une maison en pisé, tous les murs sont autoportants, c’est-à-dire qu’ils supportent une partie du tout. Supprimer un mur intérieur ou créer une ouverture n’est pas une opération qui doit être prise à la légère mais qui reste tout à fait réalisable à condition de bien préparer le terrain : procéder à une étude de structure, mettre en œuvre une poutre IPN ou HPN, et faire réaliser les travaux par un professionnel expérimenté dans le travail du pisé. 


Aménager les combles

L’aménagement des combles est également une solution efficace pour gagner de beaux mètres carrés. Cela nécessite d’isoler la toiture. Deux options s’offrent alors à vous :

  • L’isolation par l’intérieur, solution plus économique mais qui oblige à dire adieu à la vue sur la charpente et surtout fait perdre de la hauteur sous faîtage.
  • L’isolation par l’extérieur en sarking, solution qui peut s’imposer quand la couverture est à revoir.  

Dans les deux cas, une étude structure est nécessaire pour évaluer la résistance de la charpente. Il faudra également vérifier la tenue du plancher et le renforcer le cas échéant. C’est aussi le moment de penser à l’isolation acoustique du plancher, à la position de l’escalier et à l’éventuel prolongement des réseaux d’eau et de chauffage.

Les précautions à prendre côté jardin

On a tendance à ne pas y penser, mais aménager les pourtours d’une maison en pisé peut avoir des conséquences sur le bâtiment. Voici quelques précautions à prendre avant de faire son plan de jardin.
 

Créer une terrasse oui… mais oubliez la terrasse maçonnée !

Une terrasse maçonnée suppose de réaliser des fondations. Mais par définition, la terrasse jouxte le bâtiment principal, et même bien réalisée sur le plan de la gestion de l’eau et des remontées capillaires (via un drainage), ses fondations risqueraient de modifier les forces sur les soubassements du bâtiment. Mieux vaut donc ne pas prendre de risque et installer une terrasse en bois ou même délimiter un espace terrasse avec des graviers.
 

Un terrain au bon niveau

Attention également à ne jamais surélever le niveau du sol au-delà de la hauteur des soubassements. En effet, si les soubassements sont enterrés, le pisé sera en contact direct avec l’humidité et l’eau liquide présente dans le sol.
 

Action sur la végétation : prudence !

La construction d’une maison en pisé, nous l’avons déjà dit, est le résultat d’une adaptation à l’environnement. Modifier l’environnement immédiat de votre maison peut donc avoir des conséquences sur le bâtiment. 

Traditionnellement, de grands arbres étaient plantés pour protéger les façades les plus exposées au vent et à la pluie. Supprimer ces arbres modifiera donc l’équilibre de votre maison et les effets pourraient se voir rapidement sur la façade.

A l’inverse, attention à ne pas planter d’arbres trop proche de la maison. Avec le temps les racines peuvent devenir un danger pour la structure du bâtiment.

Enfin, si vous avez acheté une maison en pisé qui n’a pas été entretenue pendant plusieurs années, il se peut que la végétation soit un brin trop dense. Si du lierre a envahi vos façades, il faudra s’en débarrasser car il conserve l’humidité. Prudence toutefois s’il est bien ancré dans votre mur : là encore, la consultation d’un spécialiste du pisé est plus que recommandée avant d’intervenir. 

 

Rénover une maison en pisé, c’est un projet enthousiasmant...mais cela suppose une bonne connaissance de ce type de bâtiment ! Vous souhaitez vous lancer dans la rénovation de ce type de maison ? Faites-vous accompagner par des professionnels.

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